Topic: Gozée: 3 November 1984
Op 3 november 1984, rond 19u30, werd het Mestdagh-warenhuis van Gozée - nabij Thuin - overvallen. Bij die overval kwam de vrouw van de directeur om het leven door een schot uit een .22 long rifle. In 1987 kwam een man zich aangeven bij de politie voor deze moord. De ex-legionair werd in 1991 vrijgesproken voor de feiten.
Een aantal interessante elementen:
De locatie van de overval, nabij Thuin en het Bois de Hourpes » Google Maps
Het uur van de overval.
Het profiel van de man die terecht stond.
De overval vindt plaats tijdens de "pauze" van de Bende van Nijvel.
In het Bois de la Houssière werd een kassaticket gevonden van een Mestdagh-warenhuis in 's Gravenbrakel » Forum
Aux assises du Hainaut: la sanglante tentative de hold-up à Gozée
Les aveux tardifs d'un ancien soldat de fortune...
Les jurés du Hainaut se trouveront aujourd'hui face à un accusé bien singulier, dont la complexe personnalité rendra plus que jamais ardue la recherche de la vérité. Les faits remontent, il est vrai, à plus de six ans, et l'on peut dire pour une fois que le sacro-saint arriéré judiciaire n'est pas seul responsable d'un procès aussi tardif. Le dossier Gamache, du nom de l'accusé, Pierre Gamache, est certainement une des enquêtes les plus délicates menées ces dernières années par les autorités judiciaires carolorégiennes.
C'est le 3 novembre 1984, en effet, qu'Annie Staquet était abattue d'une balle dans le ventre, aux abords du magasin Mestdagh de Gozée, dont son mari était le gérant. Il était un peu plus de 19 h 30; le gérant avait à peine pu entendre sa femme crier, et l'apercevoir, s'écroulant, dans le couloir d'entrée, face à la porte, et avait immédiatement averti la gendarmerie, croyant à une prise d'otage.
L'absence de tout indice est d'abord bien décourageante pour les enquêteurs carolorégiens, jusqu'au mois de mai 1985, où une lueur d'espoir se fait entrevoir: la serveuse du "Rustic", un bar de nuit proche des lieux du crime, affirme avoir reçu, le soir du 3 novembre 1984, un curieux client, qui semblait très perturbé. Il aurait parlé à la serveuse de la gérante du Mestdagh, disant qu'elle venait de mourir et qu'il la connaissait très bien.
Un portrait-robot sera dressé, mais la piste finit en impasse. L'instruction s'enlise.
Le 9 août de cette année 1987, cependant, un homme de 45 ans se constitue prisonnier entre les mains de la police communale de Charleroi. Jacques Gamache, c'est son nom, affirme être l'auteur du meurtre d'Annie Staquet. Il ne voulait tuer personne, dit-il, mais avait simplement l'intention de faire un "coup", à une époque où il connaissait de graves difficultés financières. Dans ses aveux, il affirme qu'il avait beaucoup bu, pour se donner du courage, qu'il avait choisi ce magasin par hasard, et s'était muni d'une carabine à barillet 22 Long Rifle, dont il avait préalablement scié le canon et la crosse. Il raconte encore qu'il avait été surpris de trouver le magasin fermé et s'était alors dirigé vers la porte de l'appartement des gérants. Il n'avait pas eu à sonner, s'étant trouvé subitement nez à nez avec la victime. Gamache dit avoir tiré par réflexe, sans viser; l'expertise ballistique accréditera cette version.
Pourquoi ces aveux tardifs? Le remords, chez cet être que les psychiatres diront plus tard animé "d'un moralisme rigide, mais qui ne parvient pas à contrôler des pulsions agressives dans des circonstances émotionnelles difficiles».
L'instruction, dès lors, aurait du continuer sa course en roue libre, jusqu'au renvoi. C'était compter sans le curieux profil psychologique de l'accusé. En mai 1988, sans revenir sur ses aveux, Jacques Gamache clame qu'il n'était pas responsable de ses actes en novembre 1984; une série d'expertises seront menées, qui infirmeront cette déclaration.
Nouveau coup de théâtre le 24 février 1989: il fait déposer par ses avocats devant la chambre des mises en accusation des conclusions selon lesquelles il rétracte tous ses aveux.
Il ne sera certainement pas facile de saisir l'univers intérieur de l'ex-légionnaire, collectionneur d'armes, qui sut, par ailleurs, être un détenu exemplaire, qui écrivit un jour, de sa prison, au juge d'instruction, que sa détention n'était pas un calvaire, mais l'occasion d'une reconversion morale et psychologique.
Le témoignage de la serveuse du "Rustic", catégorique pour dire que son étrange client du 3 novembre 1984 et Jacques Gamache ne sont pas le même homme, sera sans doute déterminant.
Bron: Le Soir | Denis Ghesquière | 13 mei 1991
Le meurtre de Gozée jugé à Mons
Curieuse rétractation d'un étrange accusé
La première journée du procès de Jacques Gamache a été surtout marquée par la psychologie complexe de l'accusé. Entre l'aveu et la dénégation, ce dernier semble chercher un impossible compromis comme au cours de l'instruction préparatoire. Une constante cependant: Je ne suis pas un assassin, ni un meurtrier. L'ex-légionnaire n'a, dit-il, jamais voulu tuer personne. Est-ce bien lui qui a tiré sur Annie Staquet, l'épouse du gérant du Mestdagh de Gozée, le 3 novembre 1984, au cours d'un hold-up avorté?
Un étrange bonhomme pour le juge d'instruction André Dumonceaux. Il y eut d'abord sa décision de se constituer spontanément prisonnier près de trois ans après les faits. Ses aveux? Il voulait simplement faire un coup. Il avait bu pour se donner du courage et s'était muni d'une 22 Long Rifle à canon scié. Le magasin venait de fermer. Il s'est dirigé vers la porte de l'appartement du gérant. Son épouse sortait justement. Surpris, il a tiré, une seule fois, sans viser, un réflexe hérité de sept ans de Légion. Depuis février 89, il rétracte ses aveux; en fait, il voulait indirectement punir sa concubine en portant le chapeau.
Petit, trapu, les favoris reliés en moustache, Jacques Gamache a le physique d'un dur. Mais ses propos trahissent une grande vulnérabilité; de fréquents accents militaires cachent mal un homme meurtri et diminué par la vie. Interrogé sur sa jeunesse, il est soucieux de précision, cherche visiblement à paraître coopératif. Né en 1945 dans une famille de huit enfants, il perd son père à l'âge de 17 ans. Il aurait voulu être instituteur, mais fut finalement placé comme apprenti boucher. Viendra son engagement dans l'armée: une sorte de fuite, une façon d'échapper à un patron qu'il n'aimait pas. On en arrive à sa vie sentimentale, à l'échec de son mariage dont naîtront deux enfants.
Extrême confusion lorsqu'il s'agit des faits qui lui sont reprochés. Les réponses se font ésotériques: Ce n'est pas moi, c'était mon état d'esprit à l'époque.
- Mais vous étiez là, c'est vous qui avez tiré?
- Non, Monsieur le Président.
Les jurés auront aussi certainement de la peine à mesurer la portée du témoignage de l'expert en balistique, qui estime que le projectile mortel ne venait probablement pas d'une carabine 22 Long Rifle à canon scié.
Bron: Le Soir | Denis Ghesquière | 14 mei 1991
Le meurtre du Mestdagh de Gozée aux assises du Hainaut
Une instruction qui laisse un goût de trop peu...
Est-il concevable de s'accuser d'un crime qu'on n'a pas commis? Il paraît que oui. Des psychiatres ont confirmé, lundi, qu'un tel comportement se présente de temps en temps. D'accord, a-t-on envie d'ajouter, lorsqu'il s'agit de protéger quelqu'un. Mais pour lui faire du tort ou se venger d'une déconvenue? C'est l'invraisemblance essentielle du système de défense de Jacques Gamache, ex-légionnaire, boucher de métier, dont le procès se termine aux assises de Mons. C'est le 3 novembre 1984 qu'Annie Desnel, femme du directeur d'un magasin Mestdagh établi à Gozée (Thuin), fut mortellement blessée d'une balle dans le ventre, au cours de ce qui ressemble à un hold-up avorté.
Pas d'indice, aucun témoignage... Les enquêteurs ont répété leur découragement initial. Jusqu'au jour où le dénommé Jacques Gamache s'est constitué prisonnier. C'était en août 1987; le dossier avait presque trois ans. Après avoir fait la preuve d'un rare esprit de coopération et de repentir, Gamache se rétracte en février 1990. Auparavant, il niait farouchement toute intention homicide; à partir de cette date, il affirme avoir tout inventé, pour se venger de sa compagne. Les détails qu'il a fournis spontanément? Il les avait lus dans la presse, ils lui avaient été suggérés par les questions des policiers, ou il les avait déduits de conversations entendues par la suite dans le magasin. Curieux: il affirmait depuis août 1987 que, rongé par le remords, il n'osait même plus emprunter la route de Marchienne aux abords de laquelle se trouve le Mestdagh. N'a-t-on pas appris, ce mardi, que dans la période ses aveux Gamache avait écrit une lettre au mari de la victime lui demandant pardon pour le mal infligé à cette famille et invoquant la rédemption divine...
Autre fait troublant: il est avéré qu'avant de se dénoncer Gamache s'était fait conduire par sa concubine à la route de Bomerée, à Gozée, où, quelque temps plus tard, il dira avoir jeté l'arme après les faits. Par la suite, il expliquera qu'il s'agissait d'aller rechercher une chevalière égarée.
On entendra, ce mercredi, le réquisitoire de l'avocat général et les plaidoiries de la partie civile et de la défense.
Arrivée à sa phase finale, l'instruction d'audience laisse un goût de trop peu. La personnalité de Gamache reste un mystère. Une personnalité meurtrie comme semble l'être sa famille, nombreuse, honorable, mais certainement repliée sur elle-même pour avoir vécu des épreuves qu'elle se refuse à étaler au grand jour. Mais qui s'offensera d'une zone protégée de silence et de pudeur, fût-ce devant la cour d'assises, après avoir entendu, en fin d'audience, un jeune homme de 21 ans confirmer qu'il est bien, malheureusement, le fils de l'accusé, et dire plusieurs fois "ce monsieur" en parlant de son père?
Bron: Le Soir | Denis Ghesquière | 15 mei 1991
Le meurtre du Mestdagh de Gozée: un verdict surprenant aux assises de Mons
Le jury hennuyer acquitte Jacques Gamache
L'image est usée jusqu'à la corde dans le domaine sportif, et a aussi certainement de beaux jours devant elle dans l'information judiciaire: le jury populaire n'est jamais une science exacte. Telle est l'impression laissée par l'acquittement de Jacques Gamache, hier soir, aux assises de Mons. Les jurés ont en effet répondu non aux trois questions posées, le lavant de toute responsabilité dans le décès de Mme Annie Desnel, le 3 novembre 1984, au Mestdgah de Gozée dont son époux était le gérant.
Cette troisième et dernière journée de procès a été entièrement consacrée au réquisitoire et aux plaidoiries des avocats. En début d'audience, le président Lacroix annonça qu'il poserait aux jurés deux questions complémentaires, en plus de celle portant sur la qualification de meurtre retenue par le Parquet, pour une éventuelle requalification en coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
Plus souvent dans le rôle de défenseur que dans celui qui lui était cette fois-ci imparti, Me Michel Bouchat plaida en premier au nom des parties civiles, l'époux et la fille de la victime. Sans pathos démesuré, l'avocat signala que la jeune Laurence n'avait pas eu la possibilité de fêter sa maman dimanche dernier, et que ce jour festif avait été pour la septième année consécutive le rappel d'un bien douloureux souvenir. C'est aussi depuis sept ans que Laurence vit dans l'angoisse, supplie son père de quitter son métier de directeur de magasin, dans la hantise d'une nouvelle agression...
Sur la question de la culpabilité, et de la qualification de meurtre, Me Bouchat a largement empiété sur le jardin de l'avocat général. Évident, à ses yeux, que Jacques Gamache est bien l'auteur matériel des faits. Ses aveux contenaient trop de détails qu'il n'aurait pu lire dans les journaux, comme il le prétend à partir de février 1989, après s'être accusé de façon constante depuis août 1987. Pourquoi diable aurait-il choisi ce crime de Gozée, près de trois ans après sa commission? On le dit animé d'une sorte de morale rigide; auriez-vous eu l'indécence d'écrire une lettre à M. Pierre Desnel, demandant pardon d'avoir oté la vie à sa femme?
L'avocat général André Dessart, au moment de requérir, trouvait devant lui le terrain déjà fort défriché par Me Bouchat. Ce qui lui permit de s'étendre sur la personnalité de l'accusé, Jacques Gamache. En citant largement les observations du collège d'experts-psychiatres. Ils ont parlé d'une rigidité morale hypertrophiée, et notamment du besoin de se punir, d'où les aveux. Ses rétractations? Une fuite de responsabilités, un trait de caractère qui serait constant, selon M. Dessart, chez Gamache. Comme Me Bouchat, l'avocat général estime enfin que, techniquement, l'intention homicide est présente. Il a tiré impulsivement, comme à l'entraînement des légionnaires. Ceux-ci sont entraînés à tirer pour tuer...
La tâche de Mes Schonnartz et Guiliani, à la défense, pouvait sembler bien ardue. Il s'agissait en premier lieu, pour Me Schonnartz, d'expliquer le curieux comportement de son client, ses aveux spontanés suivis de leur totale rétractation. Je ne vous demande pas de comprendre Gamache, mais d'admettre qu'il existe sur la terre d'autres schémas de pensée que le vôtre... On sait aujourd'hui que les jurés ont pu l'admettre, concevoir que Gamache s'était accusé pour nuire à sa compagne, parce qu'elle l'avait humilié. Sans doute, aussi, ont-ils été sensibles aux arguments de Me Guiliani, qui s'est appliqué à dénoncer les lacunes de l'instruction, notamment le peu de cas fait d'un étrange visiteur venu, le soir des faits, parler du meurtre à une serveuse d'un bar de nuit, proche des lieux du crime. De quoi, simplement, semer le doute dont doit bénéficier un accusé.
Bron: Le Soir | Denis Ghesquière | 16 mei 1991