Re: Waver: 30 September
20 Certitudes au sujet des tueurs du Brabant
Tout commençait il y a exactement trente-cinq ans avec l’attaque de l’armurerie Dekaise à Wavre où un policier perdait la vie. Un premier meurtre qui en annonçait 27 autres.
Il y a 35 ans! Tout commençait. Le 30 septembre 1982, les tueurs du Brabant commettaient leur premier crime. A 10h35, à Wavre, chaussée de Bruxelles, en exécutant un policier de 33 ans, l’inspecteur Claude Haulotte, qui s’interposait pour barrer la fuite après un vol d’armes chez l’armurier Daniel Dekaise. Et peu après, deux gendarmes étaient grièvement blessés par balles à Hoeilaart. La voiture des tueurs, un VW Santana volée, était retrouvée, en soirée, brûlée, en forêt de Soignes.
Il y a 35 ans aujourd’hui: leur premier meurtre qui en annonçait 27 autres. Car on trouvait déjà dans les faits de Wavre qu’on reverra pendant trois ans jusqu’au derniers assassinats en novembre 1985 au Delhaize d’Alost. Voici les constantes des tueurs du Brabant.
1. Défier la police. Ils avaient tiré six semaines plus tôt sur des policiers français à Maubeuge. La plupart des truands qui se frottent à la police se tiennent à carreau un bon bout de temps. Pas eux.
2. Des francophones. "A terre ou je te crève. (…) On se tire, on a qu’on cherchait."
3. Ils suivent des drills comme celui d’arracher systématiquement la corde du cornet téléphone, un geste qu’ils reproduiront par la suite. En 1982, les GSM n’existaient pas.
4. Pas d’armes
S’ils braquèrent Dekaise pour voler des armes, c’est qu’ils n’en possédaient pas. Ca casse l’image de professionnels soi-disant liés à la police, la gendarmerie, la Sûreté, à des services étrangers ou au banditisme. Croyez-nous: ces gens-là n’ont jamais dû braquer un armurier pour s’équiper. Or, chez Dekaise, ils volèrent au moins 13 armes et sans doute 19 (6 pistolets, 9 revolvers, 4 pistolets-mitrailleurs).
5. Les véhicules?
Leur démarche est complètement atypique. Il était si facile à l’époque de partir avec une voiture que l’on en volait 30.000 par an, la plupart en rue. Eux se compliquaient la tâche: ils volaient dans des garages ou chez des concessionnaires, des voitures avec les clés de contact. Pour na pas devoir bricoler pour les faire démarrer? Parce qu’une voiture de showroom, et donc neuve, ne tombe pas en panne? En tout cas, ils étaient les seuls à agir ainsi.
6. La VW Santana utilisée à Wavre le 30 septembre 1982 avait servi le 14 août à Maubeuge dans une fusillade avec la police et pouvait être signalée. Habituellement, les véhicules sont immédiatement détruits. Aux mains des Tueurs du Brabant, ils servent généralement deux fois. C’est une prise de risque importante qui ne semble pas les avoir préoccupés. Encore une fois, en tout cas, une démarche rare.
7. Tout est préparé. La VW Santana qui servit le 30 septembre 1982 à Wavre avait été volée le 11 mai précédent.
8. Et pourquoi une VW Santana, modèle vieillot (mais passe-partout?) quand les truands de ces années-là ne juraient que par Mercedes, Audi et la BMW 528 i?
9. Les voitures sont travaillées. Ainsi déflecteur d’air avait été installé sur la VW, et peut-être la banquette arrière retirée. Avec l’aide d’un mecanicien/garagiste? On reverra plus tard de tels aménagements, effectués sur d’autres véhicules.
10. On a prétendu qu’ils n’étaient pas des prédateurs. A Wavre, ils volèrent les portefeuilles de Dekaise et des deux clients. Il n’y avait pas plus prédateurs.
11. La balle qui a tué le policier fut tirée derrière l’oreille et traversa sa tête. C’est un tir d’achèvement, si typique qu’on l’a appelé "rétro-auriculaire". Telle une signature, on retrouvera ce tir d’achèvement en 1982, 1983 et 1985, lors d’autres assassinats qu’on attribuera au même individu qu’on surnommera Tueur.
12. Ce qui précède montre que Tueur était déjà présent chez Dekaise. Il en va de même du chauffeur - souvent le même jusqu’en 1985 - qu’on surnomma Vieux. Un troisième comparse, le plus grand qu’on surnommera Géant, n’est pas décrit à Wavre mais réapparaît le 11 février 1983 pour le hold-up violent au Delhaize de Geval. On a ainsi affaire, déjà dès les débuts, à un trio qu’on ne quittera pas jusqu’à la fin.
13. A deux reprises, du moins selon des témoins, un auteur a sauté dans la voiture qui était en marche. Essayez et vous verrez que l’exercice réclame de l’entraînement.
14. De l’entraînement, il ne faillait aussi pour s’arrêter sur un parking et changer les plaques d’immatriculation alors que toutes les polices vous recherchent après le meurtre d’un collègue. A Wavre, la VW était immatriculée en France; après l’arrêt sur le parking, elle l’était en Belgique.
15. Cimetière d’Ixelles. Pour se rendre à Hal et voler la Santana, ils avaient volé une Austin Allegro à Ixelles au 32, Avenue d’Italie. La plaque belge sur la Santana était copiée de celle d’une Santana parquée devant le 225, avenue Huysmans qui est à 800 mètres seulement du 32, Avenue d’Italie. Ensuite, des témoins disent avoir vu la Santana (alors avec des plaques françaises) devant le 595, Chaussée de Boondael: bref, tout converge dans cette zone du cimetière d’Ixelles. La voiture fut abandonnée drève des Tumuli, soit à 25 minutes à pied de l’avenue d’Italie. Ajoutez qu’une de leur prochaine victime, le chauffeur de taxi Angelou, fut vue, la dernière fois, également à Ixelles, et qu’ils volèrent aussi la Golf d’une dame qui travaillait à Ixelles. Décrites par la profileuse Danièle Zucker, les convergences ixelloises apparaissent dès leur premier crime.
16. Ils connaissaient Ixelles et très bien aussi les petites rues d’Overijse.
17. Brutalité pendant le hold-up dans l’armurerie. Froideur psychopathe lors de l’assassinat du policier Claude Haulotte, tué sans autre finalité que pour tuer (blessé et à terre, il n’était plus un danger). Et sang-froid impressionnant: le combi de police gênait, ils l’ont déplacé. Et sang-froid à Hoeilaart, lors de la fusillade avec les gendarmes Roland Campinne et Bernard Sartillot.
18. Ils ont toujours eu une chance infernale. Excellent tireur, le gendarme Campinne réalise cinq tirs groupés qui devaient atteindre le chauffeur. Avec un GP 9 mm, l’homme était mort et tout s’arrêtait. Avec son 7,65, les tirs du gendarme sont allés dans le montant de la voiture. Dans leur fuite aussi, les tueurs sont passés par le seul endroit - le pont de Groenendael - où il n’y avait aucun barrage policier. Ca s’est apparemment reproduit plus tard après la tuerie d’Alost. Mais faut-il parler de “chance” au bien faut-il suspecter autre chose?
19. Chez Dekaise, trois individus opèrent à visage découvert. Première question: pourquoi ne portent-ils pas de cagoule? Seconde constatation: il faut admettre que de Michel Cocu et Adriano Vittorio à Bouhouche, Beijer, Libert, Philippe De Staerke, Bultot et des dizaines d’autres et encore récemment Tinck et Pilarski dont les photos ont largement été diffusées, les témoins du hold-up Dekaise n’ont reconnu personne.
20. Encore des mystères. Parmi les indices en lien avec la Santana retrouvés en forêt de Soignes, citons: un pèse-lettres (drogue?), un exemplaire du journal El Pais, des montures de lunettes sans les verres (déguisement?) et des morceaux de papier manuscrits, d’une écriture qui n’a pas pu être identifiée à ce jour.
Bron: La Dernière Heure | Gilbert Dupont | 30 september 2017