Cette affaire qui traumatise depuis trente ans la Belgique rebondit grâce à un témoignage recueilli près de Montpellier. Il s’appelle Jean-Marie Tinck, est surnommé “Le marin”, et l’annonce de son arrestation, lundi 12 mai à Bruxelles, a fait la une de tous les médias en Belgique. Car cet homme de 68 ans qui vient d’être incarcéré est soupçonné d’être l’un des tueurs fous du Brabant, cette équipe de malfaiteurs au cœur d’une affaire criminelle jamais élucidée, aussi sanglante que mystérieuse.
Une série de hold-up, commis dans cette région de Belgique entre 1982 et 1985, par des gangsters à la gâchette facile : dans leur sillage, ils ont laissé 28 cadavres. La justice belge s’y est cassé les dents : les seuls suspects mis en cause lors des multiples investigations ont tous été relaxés.
Trente-deux ans après les premières tueries, ce rebondissement surprise survient grâce au témoignage d’un Français, que les enquêteurs belges sont venus interroger le mois dernier près de Montpellier.
Une délégation de choc déboule le 22 avril dans l’Hérault : le procureur du Roi de Charleroi, Pierre Magnien, s’est déplacé en personne, accompagné de Martine Michel, une juge d’instruction pugnace et très expérimentée, et de deux policiers belges. Depuis 2009, la magistrate dirige un pool de douze enquêteurs qui se consacrent uniquement à l’élucidation de cette affaire hors-normes. Il y a urgence : le 10 novembre 2015, l’affaire sera prescrite.
"Il y a quelques années, un skipper français a navigué en Méditerranée avec Jean-Marie Tinck", raconte une source bien informée. Le Belge, marin et charpentier de formation, a fréquenté les ports de notre région, où il aurait eu un bateau, et s’engageait parfois comme équipier pour des convoyages de navires.
"C’est à l’une de ces occasions que le skipper français a recueilli des confidences de Tinck, qui lui a dit avoir fait partie des tueurs du Brabant", poursuit cette source. Des aveux qui restent longtemps lettre morte : ce n’est que très récemment, à l’occasion d’une rencontre avec des plaisanciers belges, que ce skipper héraultais se serait rappelé de l’anecdote, et la leur aurait racontée. "Ils s’en sont ouverts aux autorités belges", ajoute-t-on. Et à Charleroi, ce témoignage est pris très au sérieux.
Pendant une semaine, les enquêteurs belges ont donc prospecté dans plusieurs ports de notre région, et interrogé plusieurs témoins, dont le skipper français. "Il leur a visiblement apporté des éléments très intéressants", indique une bonne source.
Car le nom de Jean-Marie Tinck est déjà apparu dans l’enquête. En 1997, ce Bruxellois avait été interrogé, après avoir été reconnu par trois témoins pour sa ressemblance avec le portrait-robot n° 17 établi par les enquêteurs. Il concernait un homme ayant volé sous la menace d’une arme une voiture le 10 juin 1982 à Ixelles : elle sera retrouvée incendiée sur les lieux du vol d’un autre véhicule impliqué dans trois braquages. Bilan : un mort, un policier, et trois blessés graves, dont deux gendarmes.
À l’époque, aucune charge n’avait pu être retenue contre Jean-Marie Tinck, au profil déjà inquiétant. Selon les médias belges, il aurait été condamné pour plusieurs meurtres, notamment celui d’un patron de bar belge, en 1991.
Reste un élément troublant : depuis trois ans, un autre homme, se disant Belge et marin, raconte sur plusieurs sites consacrés à l’affaire des tueurs du Brabant une histoire similaire. Celles de confidences qu’il aurait recueillies en 2001 à Marseille auprès d’un navigateur belge, racontant "qu’il avait buté récemment un type avec sa bande (...) Mais surtout le film des tueries du Brabant lui repassait sans cesse. (...) Il m’a alors avoué qu’il avait dû tirer sur des innocents, avec sa bande."
Info ? Intox ? S’agit-il du même personnage ? Si les témoignages de ces deux plaisanciers étaient confirmés, cela laisserait entendre que Jean-Marie Tinck avait du mal à tenir sa langue sur les crimes qu’il aurait pu commettre dans sa jeunesse. À moins qu’il ne s’agisse là que des élucubrations et des divagations d’un mythomane, cherchant à se mettre en avant de bien sinistre manière.
Bron » www.midilibre.fr