Fusillades, jeudi matin à Wavre et à Hoeilaart
Un policier tué et deux gendarmes blessés en service, trois autres personnes également hospitalisées, dont une sans doute victime d’une fracture de crâne: tel est le lourd bilan de l’attaque d’une armurie du centre de Wavre, perpétrée jeudi avant midi par trois (ou quatre) truands, dont toutes les forces de polices et de gendarmerie du Royaume disposent d’un signalement précis.
Il est 10h25. Une figure bien connue de Wavre, que tout le monde appelle familièrement ‘Arturo’ se rend compte que quelques chose d’anormal se passe à l’armurie située rue de Bruxelles, à l’angle de la rue de l’Hôtel, anciennement ruelle du Grand Tour. Elle est exploitée depuis quatre ans par M. Daniel Dekaise.
‘Arturo’ se précipite au garage Fiat, qu’exploite M. Edouard Nimegers, à une centaine de mètres de là. Le 901 est aussitôt alerté, tandis que trois employés du garage, MM. Jacques Liégois, Eric Van Pée et Jean-Marie Descampe se dirigent vers l’armurie.
Ils rencontrent par hasard, une camionnette de police au volant de laquelle se trouve M. Claude Haulotte, lequel distribue des convocations électorales. Agé de trente-trois ans, marié sans enfant, il est entré dans la police en mars 1971 et est domicilié 63, chemin de Vieusart, à Louvragnes, Wavre.
“Fais gaffe, ils sont armés, lui lâche Jacques Liégois, qui vient de l’avertir de l’agression en cours. M. Haulotte n’hésite pas. Il arrête son véhicule au milieu de la rue de Bruxelles, dégaine son arme (un GP 9mm dont le chargeur contient neuf cartouche), longe les habitations et arrive devant l’armurie.
Que se passe-t-il alors? Les agresseurs – deux ou trois? – ont-ils été alertés par un comparse resté au volant d’une voiture? On l’ignore. Toujours est-il qu’ils sortent après avoir blessé à coups de crosse l’exploitant, ainsi que deux clients, MM. Gérard Gradaki et Cyrille Seykens.
Les coups de feu claquent. Le tir est nourri, même si on ne retrouve surplace que trois douilles et une cartouche. M. Haulotte, vide son chargeur mais il tombe, grièvement blessé.
Avant de prendre place dans leur voiture, les gangsters tirent encore sauvagement deux balles. Le véhicule prend la direction de Bruxelles en emprentant la RN 4. A peine a-t-il parcouru cinquante mètres qu’il passe devant le district de gendarmerie, d’où sortent deux véhicules de la BSR: l’un prend la direction de Namur, l’autre celle de Bruxelles. Cette dernière piste est la bonne.
La voiture est occupée par l’adjudant-chef (depuis dimanche dernier …) Roland Campine, quarante-neuf ans, de Wavre, et le premier maréchal des logis, Bernard Sartillot, quarante-deux ans, de Dion.
Ils sont en relation téléphonique avec le dispatching de la gendarmerie. Après quelques centaines de mètres, ils sont dépassés par une voiture suspecte, une Audi 80 de couleur bleue, qui avale évidemment bien plus rapidement que leur petite voiture banalisée la longue côte menant aux antennes de la RTBF.
M. Campine a la présence d’esprit de relever le numéro de la plaque. Il la transmet au capitaine Kensier, commandant du district, qui coordonne les opeerations et qui se rend compte aussitôt que cette plaque ne correspond pas avec la voiture de son propriétaire.
Peu après les gendarmes repèrent les occupants de la voiture (onleesbaar) finisent (onleesbaar)la plaque française de leur véhicule. La pousuite reprend en directioin de Hoeilaart et, à l’occassion d’un ralentissement de la circulation, les gendarmes se rapprochent et décident d’intervenir.
Les coups de feu claquent à nouveau, mais les forces de l’ordre doivent baisser pavillon. L’adjudant-chef Capine s’écroule, blessé par balles au ventre et à la jambe gauche; M. Sartillot est atteint d’une décharge de chevrotine dans le dos. Tous deux seront transportés à la clinique Sainte-Elisabeth, à Uccle, où leurs jours ne paraissent pas en dangers.
Les signalements
Les enquêteurs ont recueilli des témoignages intéressants qui devraient permettre, sans tarder, la confection de portrait-robots. Les bandits opéraient à trois ou quatre. L’incertitude provient du fait que certains sont tentés de croire qu’un acolyte se trouvait au volant de l’Audi bleue et que ce serait lui qui aurait lâchement abattu de dos le policier.
Ces signalements ne concernent donc que les truands qui sont sortis de l’armurie en emportant un lourd sac en plastique rempli d’armes de poing, dont M. Dekaise était spécialiste.
Le premier: corpulence moyenne, trente ans, 1m75. Type méditerranéen, grosse moustache noire, perruque noire coupée à la Jeanne d’Arc, sourcls noirs et épais. Il portait une veste trois quart bleu anthracite et un pantalon bleu foncé.
Le deuxième: corpulance mince, (onleesbaar) ans, 1m70, teinte plus claire, sans moustache, cheveux châtain clair, veston chiné de ton beige.
Le troisième serait de corpulence forte, pas très grand, visage rond, cheveux noirs, type méditerranéen.
Repérage la veille?
Un dernier témoignage, celui de M. Pierre Steinbach, un Français installé à Wavre depuis moult années: “Mercredi apres-midi, vers 15 heures, je me trouvais rue Lambert Fortune. Je me souviens très bien avoir noté la présence d’une voiture Audi bleue à plaque française. Je n’ai évidemment pas jugé opportun de relver le numéro minéralogique mais je suis formel: ce véhicule est le même que celui à bord duquel les gangsters ont opéré ce jeudi.”
De là à supposer qu’il s’agissait d’une manoeuvre de repérage, il n’y a qu’un pas, que certains enquêteurs paraissent disposés à franchir.
Bron: Le Soir | Jean Vandendries | 1 oktober 1982