Chapitre 2 de la Reconstitution de Chronos
2. Les premiers meurtres.
Quelques semaines se sont écoulées depuis les faits de Maubeuge. Sous l’impulsion d’Abdellah qui a pris définitivement les choses en main, la bande a perpétré plusieurs autres cambriolages dans des commerces alimentaires, sans accroc ceux-là. Ses deux comparses ne désirant plus commettre de méfaits au-delà des frontières après leur mésaventure française, ces vols eurent lieu uniquement sur le territoire belge, principalement dans le Brabant et dans le Hainaut. Pour y participer, Abdellah, ne disposant pas de voiture, fait régulièrement le trajet de Paris en train et séjourne en Belgique 2 à 3 jours, le temps d’effectuer les repérages et les cambriolages. Il est hébergé par son ami Saïd et a obtenu que ses frais de déplacement lui soient remboursés en prélevant le montant sur les butins.
Cependant, la fusillade à Maubeuge a fait prendre conscience aux trois truands des risques inhérents à leurs activités criminelles et du fait qu’ils n’étaient pas correctement armés en cas de grabuge. Aussi, ils décident de braquer une armurerie. Leur choix se porte sur celle tenue par Daniel Dekaise à Wavre, peu sécurisée et pas trop distante du garage où est planquée depuis quelques mois la VW Santana volée à Lembeek.
Après une reconnaissance des lieux et de l’itinéraire de fuite la veille, l’attaque contre l’armurerie est perpétrée dans la matinée du jeudi 30 septembre. Mais les choses ne se déroulent absolument pas telles qu’elles avaient été prévues. Un policier, prévenu par un passant du hold-up en cours, tente de s’interposer alors que les trois hommes s’apprêtent à quitter la boutique, non sans avoir fait main basse sur une dizaine d’armes et rouer de coups l’armurier. Abdellah n’hésite pas, fait feu sur lui, le blesse et l’achève d’une balle en pleine tête alors qu’il gît sur le sol. Pendant ce temps, Saïd se charge de déplacer la camionnette du policier stationné en plein milieu de la rue afin de dégager le passage.
Les trois comparses parviennent à prendre la fuite à bord de leur véhicule mais une voiture banalisée de la gendarmerie les prend en chasse. Quelques kilomètres plus loin, à Hoeilaart, les gendarmes parviennent à les dépasser et à bloquer leur véhicule à un carrefour. Une nouvelle fusillade éclate. Les deux gendarmes sont grièvement blessés, les trois truands s’en sortent eux miraculeusement indemnes. Malgré que leur véhicule ait été endommagé lors de la fusillade, ils parviennent à rejoindre leur cache. La nuit tombée, ils iront se débarrasser de la VW Santana à l’orée de la forêt de Soignes située à quelques kilomètres de là.
Leur première attaque à main armée a bien failli déjà être la dernière mais les voilà maintenant bien mieux équipé en cas de nouvel imprévu. Ils se tiennent quelques semaines à carreau puis finissent par perpétrer de nouveaux cambriolages. Après avoir ciblé des épiceries fines et des grossistes en vin, ils décident de s’en prendre à des restaurants, principalement situés en périphérie bruxelloise. Ils utilisent pour ce faire la voiture que Jean a acheté quelques mois plus tôt, sur laquelle ils apposent de fausses plaques d’immatriculation.
Plusieurs vols sont commis sans incident. Mais dans la nuit du 22 au 23 décembre, alors que les 3 comparses viennent de pénétrer par effraction dans l’auberge het Kasteel située à Beersel, ils sont surpris par le concierge des lieux, un homme âgé d’une septantaine d’année qui loge à l’étage. L’homme est rapidement maitrisé et ligoté. Ils le contraignent à révéler où sont cachés ses économies. Préférant ne pas laisser de témoin derrière eux, Abdellah l’abat de 8 balles tirées en pleine tête à l’aide du pistolet FN calibre 22 volé quelques mois plus tôt chez Dekaise.
Deux semaines plus tard, dans la nuit du 8 au 9 janvier 1983, un autre drame va se produire. Après avoir cambriolé un commerce, le trio se rend comme à son habitude au 33 rue Paul Spaak afin de décharger du véhicule les marchandises volées. Après avoir pris congé de leur acolyte, Saïd et Abdellah cherchent à rentrer à Braine-le-Comte mais ils ne sont pas motorisés. Il est 2h du matin. En se dirigeant vers la place Flagey, ils aperçoivent un taxi et le hèle. Mais le chauffeur refuse de les emmener aussi loin et accepte tout au plus de les conduire jusqu’à Anderlecht, à hauteur du ring. Arrivés-là, le chauffeur leur demande de sortir. Abdellah ne voulant pas se trouver en rade à une heure aussi avancée de la nuit insiste pour qu’il les conduise jusqu’à leur destination. Une dispute éclate. Enervé par le refus du chauffeur de taxi, il sort son pistolet et le tue de 4 balles en pleine tête. Après quelques hésitations, les deux comparses décident de cacher le corps du malheureux dans le coffre de la voiture et prennent la route de Braine-le-Comte. Saïd est déposé à son domicile. Abdellah reprend lui la route jusqu’à Mons, y abandonne le taxi et se rend à pied jusqu’à la gare afin d’y attendre le premier train direction Paris.
Si les revenus des cambriolages permettent à Abdellah d’améliorer sensiblement son quotidien et celui de sa petite famille, ils sont loin d’être suffisants pour qu’il puisse mener grand train comme il le désire. Aussi, germe dans son esprit une idée : attaquer des supermarchés et faire main basse sur leur recette.