Michel Libert (ex-PAL, ex-MAD, ex-WNP): 1m91 et quatre portraits-robots troublants.
A l’heure du bilan, Michel Libert pourra dire que l’essentiel de sa vie a été marqué par un fait avec lequel il n’a rien à voir. Michel Libert est le dernier “mis en garde à vue” connu dans l’enquête sur les tueries du Brabant pour lesquelles il a été “suspects” pendant 30 ans. Le 23 octobre 2014, après 48h d’audition, quand on lui annonce qu’il peut disposer et rentrer chez lui, le commissaire Jean-Philippe G. soupire: “Pour moi, vous n’avez strictement rien à voir dans l’histoire.”
Le lendemain, Libert, matraqué par les médias, avait perdu son job, comme cela lui était arrivé deux fois précédemment pour les mêmes motifs. A peine avait-il été privé de liberté, les médias en étaient informés – par qui? – et, curieusement, relève Libert, l’arrestation s’accompagnait de la diffusion à la télé de reportages accusateurs “à des-sein (…). Il fallait me jeter en pâture.” Dans quel but? “Rassurer le bon peuple et montrer qu’on travaillait d’arrache-pied sur ce qu’on appelle la piste politique.”
Mais quand Libert est relaxé sans inculpation deux jours plus tard, le même commissaire G. lui dit: “Vous étiez le dernier. Après vous, il n’y a plus personne.”
Huit équipes d’enquêteurs ont travaillé sur Libert depuis 1984, “posant toujours les mêmes questions auxquelles je répondais de la même façon. Oui, j’ai appartenu au PAL (Polizei Algemeine Leuchte), un organe du MAD (Militärische Abschrim Dienst). Oui, j’ai appartenu au WNP. Oui, j’ai connu la plupart. Oui, je continue de me poser des questions sur certains (quant à leur implication éventuelle dans les tueries). Mais je ne sais rien. Je n’ai pas d’information qui puisse étauyer la piste politique qui est selon moi possible mais pas du tout certaine, certainement pas. Je n’ai rien que des suppositions.”
Avec son 1m91, Michel Libert a été soupçonné d’être le Géant d’Overijse, Braine-L’Alleud, Beersel, Alost. “Ce qui était aisé vérifier, ils ne l’ont pas fait. De la police basique: mon alibi! J’étais où le 9 novembre 1985 à 19h? Entre ma mère handicapée et mes deux boulots au GB et dans cette société de contre-espionnage industriel que j’étais en train de lancer?”
Michel Libert fait ce constat: “Cette enquête est trop longtemps partie de théories auxquelles on essayait de force de faire coller les faits, et pas des faits eux-mêmes. Au début, des enquêteurs comme Balfroid et Bihay partaient des indices qui convergeaient et s’imbriquaient intimement dans les données que j’apportais. Ils travaillaient trop bien. Du jour où on les a dégommés, les dés étaient pipés. Un jeu de dupes.”
Outre sa taille, Michel Libert a contre luis son … visage. “Je correspons à quatre des portraits-robots – les numéros 15, 17, 19 et 21, selon que l’on ajoute ou retranche la moustache et les lunettes. Des portraits-robots? C’était quoi, ces grands professionnels qui travaillent sans cagoule?”
Cette affaire (les soupçons) “a gâché ma vie”. “Et Dieu sait pourtant si j’ai accepté de collaborer. J’ai dit tout ce que j’avais à dire. Le citron (que je suis) n’a pas été ppressé, mais centrifugé. Et ça ne leur convenait toujours pas. ce qui fait de ce dossier d’1.750.000 pages le plus gros fiasco policier, c’est l’enfumage. Quand on demande à un ancien chef d’enquête ayant travaillé 25 ans dans celle-ci s’il espère que le nom des tueurs y est cité fût-ce une fois, sa réponse est incroyable: ‘j’en sais rien’.”
En situation financière précaire, Michel Libert, maintenant 60 ans, développe un projet d’aide aux enfants victimes de maltraitances. “Quand mon nom est mal cité dans les médias, je porte plainte et demande des dommages et intérêts. 50% partiront en honoraires d’avocat, le reste dans la fondation.”
Entre 1982 et 1985, les tueurs du Brabant ont fait 28 victimes. Aucun n’a été arrêté. Le mystère est complet. C’est le plus gros fiasco policier belge.
Bron » La Dernière Heure