Les familles des victimes des Tueries du Brabant tirent la sonnette d’alarme. Si cette législature sortante ne parvient pas à se mettre d’accord pour allonger le délai de prescription pour les “crimes non correctionnalisantes”, l’une des plus importantes affaire criminelle qu’ait connu la Belgique, sera définitivement close le 10 novembre 2015, soit dans 609 jours.
Dans une lettre ouverte rédigée au nom des familles des victimes, Patricia Finné, dont le père fut abattu, exprime sa plus vive inquiétude. “Les tueries du Brabant. Un sujet que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaitre. Ou très mal. Mais que les autres ne peuvent oublier. La plus grave affaire criminelle de l’histoire criminelle de Belgique: 28 morts dans une série de cambriolages et de hold-ups commis entre 1982 et 1985 par des individus dont nul ne connait les motivations et encore moins l’identité.”
“Les faits seront prescrits définitivement le 9 novembre 2015, trente ans après la dernière tuerie commise au Delhaize d’Alost (huit morts pour un butin peu élevé). Même si les tueurs sont identifiés et inculpés aujourd’hui, il faudrait que leur procès se termine au plus tard le 9 novembre 2015. Or disons le directement: c’est totalement impossible. Il faudrait des mois voire des années pour organiser ce qui deviendrait le plus grand procès d’Assise jamais organisé chez nous. Et des mois pour mener le procès à terme. Il existe pourtant un dernier espoir de voir les tueurs menés un jury populaire : modifier la loi sur la prescription.”
Patricia Finné et les autres victimes souhaitent que les délais de prescription soient portés à 20 ans (15 actuellement), renouvelables une fois, soit 40 ans. Cela donnerait 10 ans de plus aux enquêteurs pour tenter d’achever leurs investigations.
“Le monde politique reste frileux par rapport à un tel enjeu: il n’existe pas de volonté des partis de voter cette loi. Et la proximité des élections n’arrange guère les choses. La Ministre de la Justice Turtelboom se braque sur sa position qui ne varie pas: s’il existe des éléments permettant de croire que les enquêteurs puissent aboutir, alors on réfléchira à l’allongement de la prescription. Or ces éléments existent. C’est un secret de Polichinelle. Le temps de la réflexion et des palabres est révolu. Il faut passer aux actes.”
Le MR a déposé, sous l’emprise de l’urgence, une proposition de loi à la Chambre. Mais ce texte demeure bloqué à la Commission de la Justice. Le MR s’en désespère. “Les Chambres seront dissoutes quarante jours avant les élections. Il faudrait donc examiner ce texte sans tarder”, dit-on au MR.
Les avis des juristes sur un allongement de la prescription sont partagés. Une bonne justice peut-elle se rendre après auprès autant d’années? Les souvenirs des témoins peuvent-ils encore être exploités? “Les victimes et leurs proches attendent non une vengeance mais Justice. Il suffirait de cinq minutes. Cinq minutes de courage politique”, écrit Patricia Finné.