Le portrait de Martine Michel qui instruit au finish… une affaire vieille de 30 ans. Qu’elle relance au culot. Croit-elle vraiment pouvoir élucider les Tueries du Brabant?
De Martine Michel, on dit généralement qu’elle connaît comme sa poche le milieu du grand banditisme… ordinaire. Des journalistes chuchotent même qu’à elle seule, elle serait responsable de la détention de la moitié des truands qui garnissent les prisons de la région de Charleroi.
Serait-ce pour cette raison que la sixième juge d’instruction en charge du dossier des Tueries du Brabant semble ne pas croire une seconde en la thèse de prédateurs isolés, à l’inverse d’un magistrat influent comme Jean Deprêtre, décédé en juin dernier? Elle ne reconnaîtrait pas en les Tueurs, qu’elle pourchasse pour cette mission de la dernière chance, les malfrats qu’elle côtoie depuis des années…
Martine Michel a 51 ans. On sait peu d’elle. Un peu plus, toutefois, qu’à propos de son ancienne homologue carolo France Baeckeland, qui lui a volé la vedette de 2005 à 2012, en traquant d’autres délinquants, en col blanc. Quelques rares photos de cette femme aux cheveux noirs de jais circulent sur le Net. Dès 2009 et sa nomination à la tête de la cellule du Brabant wallon, forte d’une dizaine d’enquêteurs, la sixième juge s’est d’ailleurs empressée de sortir du bois. Martine Michel compte manifestement sur une certaine médiatisation, afin d’éviter que son dossier ne s’éteigne avant la prescription.
Sens de la méthode
Ce petit bout de femme instruit seule. Exit, le président du tribunal de première instance de Charleroi, Jean-Paul Raynal, qui faisait office de doublon en tant que juge associé (mais il reste son chef de corps!). Dehors, les deux chefs d’enquête au long cours, controversés et dont on dit qu’elle doutait. On raconte qu’avec son greffier pourtant aux portes de la pension, elle a produit un travail de titan en… classant 1,2 million de pièces d’un dossier laissé en friche.
Rappelez-vous: ces portraits-robots des Tueurs du Brabant, criminels les plus recherchés de l’Histoire du pays. On ne savait même plus à quels faits il fallait les associer. Rien n’était rangé parmi les dizaines de cartons accumulés. Impossible, avant son arrivée, d’ouvrir le dossier-mammouth en s’orientant via le nom d’un coupable présumé, d’un lieu-carrefour ou d’une date importante.
Peut-être ce sens de la méthode, cette ambition à… tout reprendre depuis le début, cet entêtement à se focaliser sur les 30 dernières heures des Tueries des années 1982 à 1985 lui permettront-ils de réussir l’impossible. En attendant, la juge Michel n’a pas froid aux yeux. Ces derniers mois, elle a “rencontré” à plusieurs reprises les anciens patrons de la Sûreté de l’État, arrogants et si longtemps murés dans leur mutisme. Elle perquisitionne dans les milieux d’extrême droite, encore que le mot soit faible: des anciens adeptes des Jeunesses hitlériennes qui se moquent d’elle par médias interposés.
2015
Nul ne sait si les Tueries deviendront son obsession. On pourrait l’imaginer. Encore que son emploi du temps reste bien chargé. Entre deux chicanes de ce dossier impossible, la juge Michel vaque à toutes ses autres occupations. Tiger-kidnappings, vols avec violence, criminalité “classique”. La juge semble un brin maso.
Elle n’attend qu’une chose, semble-t-il: que la ministre de la Justice Annemie Turtelboom, avec laquelle elle aurait quelques atomes crochus, vole à son secours en étendant encore la prescription sur les Tueries. Qui, sinon, tomberont le voile en 2015.
Bron » L’Echo